D'après les mémoires du soldat Thomas Easton (2nd Tyneside Scottish Battalion, 34th Division).
"Je n'avais pas 20 ans. J'étais engagé volontaire pour 20 mois. J'avais l'expérience des tranchées depuis janvier 1916, comme la plupart de mes camarades. Mon frère aîné était avec moi dans cette bataille, et ce qui était le pire pour moi, c'était de penser ce que deviendrait notre famille si nous étions tués tous les deux.
Je dois sans doute à la volonté divine d'avoir survécu à ce jour, mais une aventure extraordinaire survenue reste gravée dans ma mémoire.
Nous longions les lignes allemandes pour trouver une position favorable dans laquelle nous serions en mesure d'ajuster notre tir. Je trouvais un de mes meilleurs camarades assis à l'emplacement d'une position d'artillerie allemande, alors que je le croyais au-dessus en train d'avancer. Il avait le dos contre un mur et je pensais qu'il avait besoin d'être encouragé : "tu n'avances pas ?" lui demandais-je. Il me demanda de m'asseoir. Je protestais en lui disant que nous avions autre chose à faire, et qu'il risquait d'être mis aux arrêts. Il me déclara que ce ne serait pas long et me demanda si j'entendais la musique. Je n'entendais absolument rien. Il me décrivit alors ce qu'il voyait : le ciel entier s'ouvrait, des orchestres jouaient, des chorales chantaient et tous ses ancêtres étaient là et l'enjoignaient de venir les rejoindre. Il tendit les mains vers le ciel : "il y a mon vieux père" dit-il, "ils sont en train de m'attendre".
Soudain il tomba visage contre terre : un éclat d'obus lui avait transpercé la poitrine. Il n'avait eu aucun regret et avait bien accueilli la mort.
Ce fut une grande expérience pour moi, et malgré un tel choc, cela me rendit le courage de faire le devoir de soldat que j'avais accepté volontairement."
Thomas Easton est décédé en 1984. Une stèle est érigée à sa mémoire près du trou de mine de La Boisselle.